samedi 13 novembre 2010

Nez qui saigne...

Mardi dernier, je terminais mon mon billet par:
"J'espère vraiment pouvoir rejouer en fin d'après midi. J'ai un bonus de 500€ à faire avant le 03/12. C'est a priori assez tranquille, si j'arrive à jouer, et si ce gros bad run ne se propage pas au poker. Car si je dois redescendre, ce sera moins easy..."

Quatre sessions plus tard, mon tracker affiche -922€ depuis le début du mois de la semaine, et ma bankroll EVT est tombée à 2300€. Cette semaine est un cauchemar.

Tout d'abord, un petit retour sur la paire de rois que je tourne en bluff contre la barre de fer. Le soir, dans mon lit, plusieurs mains me reviennent comme des flashs. Comme j'essaye de penser à autre chose, je les laisse filer assez vite. Néanmoins, l'un des flashs retient mon attention. "Il snap-call un peu vite la barre de fer avec son brelan sur la couleur qui rentre..." Du coup, j'ai un petit doute. Le lendemain matin, j'ouvre mon tracker, et vérifie le tableau de cette main, et c'est bien ce que je pensais, le 2 avait doublé à la turn, et j'ai donc essayé de bluffer quelqu'un qui avait les nuts, alors j'ai une bonne lecture dès que départ du coup... Y'a pas tilt là ??


Mercredi, j'ai refait une session de 500 mains, assez solide, où je sors une cave au dessus. A ce moment là, tout va encore bien. J'ai bien encaissé le coup. Le soir, je vais faire un sit and go  chez des potes. Nos sit and go sont assez particuliers, vu qu'ils commencent 600bb deep. Nous sommes 9 joueurs au départ et nous nous connaissons très bien. J'arrive là-bas avec beaucoup d'envie, sans trop savoir ce que je fais faire. Ca dépend toujours un peu de:
- la disposition des joueurs
- l'humeur des joueurs présents
- mon humeur

J'ai la chance d'avoir le joueur le plus agressif et le plus compétant à ma droite. Je dois folder mes quatres premières mains (ce qui est rare, aussi deep, dans ce genre partie). Mais j'ai de vrais poubelles et je suis lors de ces quatre mains entre UTG+1 et SB. Lors de ces quatre premières mains, le joueur à ma droite est déjà très actif, ce qui ne me surprend pas. Mais les adaptions apportées par les autres joueurs sont: "call, call, call". Ce qui ne me surprend pas trop non plus, mais me saoule un peu. 

Du coup, mon choix est fait. Au lieu de caller en position toutes mes mains jouables pour jouer des multiway en position, je vais au contraire toutes les sur-relancer. Et j'ai eu beaucoup de mains jouables ce soir là, et j'ai beaucoup touché de flop pour continuer à miser derrière. Du coup, je me suis vraiment régalé une grosse partie de la soirée. J'ai déstacké assez vite le joueur à ma droite en relançant une pp5 UTG pendant que sa défense de blinde avec 98o trouvait un tirage ventral. Il check call le flop puis check raise à tapis mon overbet turn (une nouveauté que j'expérimente ces dernier temps en live).

Lorsqu'il reste 6 joueurs, j'ai un tapis énorme, et il ne reste qu'un seul autre stack conséquent. Nous sommes face  à face, avec deux joueurs intercalés de chaque coté de la table. Je contrôle assez bien la situation. Les quatre autres joueurs sont shorts et passifs, et je m'applique à leur mettre la pression tranquillement en essayant d'éviter de les laisser doubler avec peu de mon coté. Il faut dire que la plupart de ses quatre joueurs cherchent surtout à voir des flops, donc c'est assez facile à gérer. Puis vient l'accident. Je relance AQs à coeur UTG, et le 2e gros stack me sur-relance du bouton. Il est capable d'être agressif, et sait très bien la pression qu'il peut me mettre avec son stack et la position. Je pense que sa range est assez large, et je décide de défendre, pour ensuite essayer contrôler le coup. Le flop vient QTx dont deux coeurs... 

Du coup, mon envie change. J'ai désormais envie de lui faire faire une grosse erreur. Je check min raise le flop, car mon min raise représente 20/25% de son stack. Autrement dit, cette relance lui fait craindre de partir pour jouer son stack complet contre quelqu'un qui le couvre, sur un board ou il y a gavé de tirages. Et il sait que ce min raise  peut être beaucoup de choses, y compris rien, vu que ma sur relance fait à peine 10% de mon stack. Il finit par pousser et je call instantanément. Vu mon image de maniaque, je n'envisage pas une seule seconde de folder. Si c'était le cas, je me serai contenté de payer sa mise, ou de folder préflop. Il fait la moue... Son AK sans coeur est en très mauvaise posture face à ma main...

Mais c'est sans compter le K qui vient le sauver...

En tant normal, ce genre de coup dans me laisse froid, encore plus dans les parties entre amis. Là, vu la semaine écoulée, et mon début de partie, j'accuse un peu le coup. Perdre ce 85/15 qui m'aurai donné la moitié des jetons de la table à 5 joueurs restant dans cette partie que j'avais bien dominée depuis le début m'aurait bien plu, c'est un euphémisme. J'ai néanmoins réussi à m'en remettre partiellement. Je suis retourné grinder les jetons comme si de rien n'était, mais avec une marge de manœuvre moindre. Finalement, j'ai réussi à rentrer dans l'argent, plus pour le principe que pour les 20€. Mais je suis aussi rentré chez moi avec une belle cicatrice, et le sentiment d'avoir fait une belle partie, d'avoir une nouvelle fois été créatif, et d'avoir fait pas mal de dégats. 

On passe à Jeudi. Retour online, en NL100. Je me disais qu'un jour férié est un jour travaillé pour un joueur de poker. Celui ci ne fait pas exception à la règle. Les tables sont très bonnes.

4h15 cauchemardesques plus tard, je stoppe la session à -460€, 350bb sous l'EV après avoir à peu près tout vu. Set ups, bad beats dans des pots à plus de 200bb... Je me suis accroché longtemps, mais j'ai aussi fini par faire quelques boulettes... J'encaisse très mal cette session. La petite flamme à l'intérieur de moi vacille un peu. Mon jeu s'est dégradé sur la fin. Plus assez de value bet par crainte de faire grossir des pots oop et de me faire suck out derrière. Excès d'agressivité parfois. Weakitude d'autre fois. Je finis un peu perdu, groggy.


J'ai joué trop longtemps, pour de multiples raisons, certaines bonnes, certaines mauvaises.
- les tables étaient bonnes (bonne raison)
- j'avais envie de jouer (bonne raison)
- je pense aussi que j'avais envie de remonter. (tilt raison)

D'ailleurs, je suis tellement perturbé, que le soir, je n'arrive pas à dormir. Autant Mardi soir j'étais parvenu à me réfugier dans mon cerveau droit, et à soigner ma tristesse, autant Jeudi soir, mon cerveau gauche ne me laisse pas tranquille. Il continue de rejouer toutes les mains, et se pose 10000 questions. Je n'arrive pas à me concentrer pour lire non plus. Du coup, je finis par me relever vers 2h00 du matin. Que faire pour faire taire mon cerveau gauche? Je n'ai pas envie de l'écouter. J'ai envie d'oublier le poker plusieurs heures. Je finis par allumer la console, et lancer une partie de "Pure", un jeu de Quad. Cette partie va durer environ 20h00 non stop, le temps de gagner toutes les courses ou presque du jeu. Me voilà Vendredi soir, défoncé de fatigue, avec une ampoule au pouce gauche (véridique), au fond du trou. Je m'endors sur le canapé devant Monfils - Murray, et j'ai l'impression d'être revenu plusieurs mois en arrière. 

Je me réveille à 06h00 ce matin... WTF ?? Je n'ai pas assez dormi, mais j'ai un peu récupéré. Je me demande comment sont les tables sur Everest, et j'ai le sentiment d'avoir envie de retourner boxer. L'idée me semble douteuse, mais une petite voix me dit "Quand on tombe de cheval, il faut remonter tout de suite". OK. C'est parti.

3h plus tard de NL50/NL100, je suis 130€ derrière. Cela fait bien un an que je n'ai pas joué aussi mal. La session n'a pas été très bonne. Mais j'ai encore gâché pas mal. Pire, je n'ai plus aucune confiance, ni aucune lucidité.  Je n'aurais pas du jouer ce matin, je suis triste, frustré, en plein doute, et fatigué... Une pause s'impose.


J'ai aussi joué trop longtemps, cette fois surtout à cause de mauvaise raisons:
- Je n'ai pas vu le temps passé (un peu hors du temps vu la journée de la veille)
- Les tables étaient bonnes

Le seul point positif, c'est que la flamme est toujours là. Il y trois mois, une semaine de ce type m'aurait plongé dans 6 mois de déprime et d'auto destruction. Là, j'ai le nez qui saigne bien, mais une partie de moi est toujours debout. Je sais que je peux vite retrouver mon jeu. Un peu de repos, quelques vidéos, quelques lectures, et je retrouverai vite mes esprits. Je n'ai pas envie de laisser tomber. J'ai mal, mais mon envie aujourd'hui est de récupérer moralement (et physiquement) 2 ou 3 jours, de retourner travailler, et de retourner boxer. OK, j'ai fait des erreurs, mais je n'ai pas envie de tout casser comme d'habitude.


Au fond de moi, je sens que je suis commited. Je ne peux pas faire demi tour maintenant, juste après une semaine difficile et trois mauvaises sessions.

Il n'y a pas longtemps, j'écrivais que je me sentais prêt à gérer une mauvaise période... Ah ouais ? Tient, mange toi ça... Bienvenue dans la vraie vie d'un joueur de cash game...


OK, je ne suis pas si prêt que ça. 

Y'a quelque chose qui cloche la d'dans... J'y retourne immédiatement...

PS: pour ceux qui ont un peu de temps à tuer, voici une vidéo que je trouve géniale d'une neuro-biologiste qui décrit l'accident cardio vasculaire qu'elle a eu plusieurs année plus tôt. C'est passionnant, drôle et émouvant.



Jill Bolte Taylor, sous-titre français
envoyé par postatheisme. - Vidéos des dernières découvertes technologiques.



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